Mais non, ne te parfume pas ; le meilleur parfum c'est toi...
Ils s’écrivirent avec ardeur, passion…
Leur abondante correspondance est un petit joyau de la littérature française :
Gustave Flaubert et Louise Colet.
Gustave Flaubert qui avait dédié toute sa vie à l’écriture, trempait sa plume des heures durant, jour et nuit, dans l’encre des mots. Louise Colet, sa première maîtresse et véritable amour de sa vie, poétesse romantique à qui Gustave déclarait « Ne m’aime pas tant, tu me fais mal ! Laisse-moi t’aimer, moi ! », ou encore « puisque tu m’aimes, je t’aime toujours »…
Entre 1846 et 1860, les deux amants se sont échangés des centaines de lettres. Une période qui évoquera certainement quelque chose aux amoureux de l'auteur, car il s'agit des années pendant lesquelles l'Ermite de Croisset s'est donné corps et âme à l'écriture de son premier chef d'oeuvre : Madame Bovary - "sa deuxième maîtresse", ainsi que la surnomme avec ironie "la première."
Les passages de Madame Bovary attestent des similitudes entre les "deux maîtresses" de Gustave Flaubert. Celle qui était surnommée "La Muse" par de nombreux artistes (elle a également été la maîtresse d'Alfred de Musset, de Victor Cousin ou encore d'Alfred de Vigny) était avant tout celle de Flaubert, car elle a été pour lui la source d'inspiration d'une de ses plus importantes héroïnes de papier.
Extraits :
...Dis-moi si tu te sers de la verveine ; en mets-tu sur tes mouchoirs ? Mets-en sur ta chemise. Mais non, ne te parfume pas ; le meilleur parfum c'est toi, l'exhalaison de ta propre nature. Allons, demain matin peut-être aurai-je une lettre.
Adieu, je te mords ta lèvre. Y est-elle toujours la petite tache rouge ?
Adieu, mille baisers. A lundi peut-être ; je réapprendrai la saveur des tiens.
A toi, à toi corps et âme...
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...Tu donnerais de l'amour à un mort. Comment veux-tu que je ne t'aime pas ? Tu as un pouvoir d'attraction à faire dresser les pierres à ta voix. Tes lettres me remuent jusqu'aux entrailles. N'aie donc pas peur que je t'oublie ! Tu sais bien qu'on ne quitte pas les natures comme la tienne, ces natures émues, émouvantes, profondes. (…) Non, je ne t'ai jamais menti, je t'ai aimée instinctivement, et je n'ai pas voulu te plaire de parti pris. Tout cela est arrivé parce que cela devait arriver. Moque-toi de mon fatalisme, ajoute que je suis arriéré d'être Turc. Le fataliste est la Providence du mal, c'est elle qu'on voit, j'y crois.
Oh ! Que je voudrais faire de grandes oeuvres pour te plaire, que je voudrais te voir tressaillir à mon style, moi qui ne désire pas la gloire (et plus naïvement que le renard de la fable) ; je voudrais en avoir pour toi, pour te la jeter comme un bouquet, afin que ce soit une caresse de plus et une litière douce où s'étalerait ton esprit quand il rêverait à moi.
Tu me trouves beau ; je voudrais être beau, je voudrais avoir des cheveux bouclés, noirs, tombant sur des épaules d'ivoire, comme les adolescents grecs ; je voudrais être fort, pur, mais quand je me regarde dans la glace et que je pense que tu m'aimes, je me trouve d'un commun révoltant. J'ai les mains dures, les genoux cagneux et la poitrine étroite. Si j'avais seulement de la voix, si je savais chanter, oh ! Comme je modulerais ces longues aspirations qui sont obligées de s'envoler en soupirs ! Si tu m'avais connu il y a dix ans, j'étais frais, embaumant, j'exhalais la vie et l'amour ; mais maintenant je vois la maturité toucher à la flétrissure.
Que n'es-tu la première que je connaisse ! Que n'ai-je pour la première fois senti dans tes bras les ivresses du corps et les spasmes bienheureux qui vous tiennent en extase !...
A n’en pas douter, l’une des plus belles correspondances de la littérature française.
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