C’est encore toi que mes mains appelaient
Lorsque trop d'inquiétude venait, trop d'incertitude, et que la pluie ou le froid rendaient mes sorties impossibles, je me levais et j'allais dans une autre pièce, déplier une de tes lettres, sur un coin de table, sous le rond laiteux d'une lampe.
Parfois aussi je m'égarais dans la préparation et dans la cuisson de gâteaux, dans le milieu de la nuit. Pour rien. Parce que ces gestes très ordinaires me délivraient de toute crainte et conjuraient l'amertume.
C'est encore toi que mes mains appelaient, c'est encore ta douceur qu'elles demandaient en soulevant ces nuages, en se perdant dans ces blancheurs diverses des farines, du sucre, des oeufs, du lait.
Christian Bobin
Ecrivain, poète (1951-2022)
Extrait de "L'eau des miroirs"
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